Lorsqu ' il faudra aller vers Vous, ô mon Dieu, faites que ce soit par un jour où la campagne en fête poudroiera. Je désire, ainsi que je fis ici-bas, choisir un chemin pour aller, comme il me plaira, au Paradis, où sont en plein jour les étoiles. Je prendrai mon bâton et sur la grande route j'irai, et je dirai aux ânes, mes amis : Je suis Francis Jammes et je vais au paradis, car il n'y a pas d'enfer au pays du Bon Dieu. Je leur dirai : Venez, doux amis du ciel bleu, pauvres bêtes chéries qui, d'un brusque mouvement d'oreille, chassez les mouches plates, les coups et les abeilles... ... ...
Le terreau, la ciboule et le lys me parfument. Je suis comme un jardin, je porte des légumes. Et si c'est un melon j'ai l'air d'un oriental, qui a dessus son dos une outre de cristal. Je salue en passant les choses matinales : la rosée, les osiers, et les fleurs du Bengale, les écoliers qui ont des pièges à moineaux, l'ouvrier sans travail, l'aiguiseur de couteaux, la laitière de roses aux jambes décidées, le soldat-laboureur qui passe entre les blés. Je comprends peu la terre à cause du mélange. Je comprends mieux le ciel où il n'y a que des nuages. Cependant c'est en vain qu'à chaque instant j'essaie d'escalader l'air bleu, de mon sabot usé. Chaque fois le sabot retombe, malhabile, rivé au sol par des entraves invisibles...
Comme c'est beau et doux tout cela. On aurait envie de caresser tout doucement la tête soyeuse de cet âne-là et de le regarder dans les yeux pour qu'il raconte son silence et un peu, je crois, sa tristesse...
4 commentaires:
vraiment ?
il est charmant Albin, un peu vert
Prière pour aller au paradis avec les ânes
Lorsqu ' il faudra aller vers Vous, ô mon Dieu, faites
que ce soit par un jour où la campagne en fête
poudroiera. Je désire, ainsi que je fis ici-bas,
choisir un chemin pour aller,
comme il me plaira,
au Paradis, où sont en plein jour les étoiles.
Je prendrai mon bâton et sur la grande route
j'irai, et je dirai aux ânes, mes amis :
Je suis Francis Jammes et je vais au paradis,
car il n'y a pas d'enfer au pays du Bon Dieu.
Je leur dirai : Venez, doux amis du ciel bleu,
pauvres bêtes chéries qui,
d'un brusque mouvement d'oreille,
chassez les mouches plates, les coups
et les abeilles... ... ...
Francis Jammes
L'âne du jardinier
Le terreau, la ciboule et le lys me parfument.
Je suis comme un jardin, je porte des légumes.
Et si c'est un melon j'ai l'air d'un oriental,
qui a dessus son dos une outre de cristal.
Je salue en passant les choses matinales :
la rosée, les osiers, et les fleurs du Bengale,
les écoliers qui ont des pièges à moineaux,
l'ouvrier sans travail, l'aiguiseur de couteaux,
la laitière de roses aux jambes décidées,
le soldat-laboureur qui passe entre les blés.
Je comprends peu la terre à cause du mélange.
Je comprends mieux le ciel où il n'y a que des nuages.
Cependant c'est en vain qu'à chaque instant j'essaie
d'escalader l'air bleu, de mon sabot usé.
Chaque fois le sabot retombe, malhabile,
rivé au sol par des entraves invisibles...
Francis Jammes
Comme c'est beau et doux tout cela. On aurait envie de caresser tout doucement la tête soyeuse de cet âne-là et de le regarder dans les yeux pour qu'il raconte son silence et un peu, je crois, sa tristesse...
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